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NORMANDIE / Manufacture Bohin, de fil en aiguille
NORMANDIE / Manufacture Bohin, de fil en aiguille
La Manufacture Bohin, c’est l’histoire d’une région, d’une époque, d’une pratique industrielle, racontée par le chas de l’aiguille. C’est aussi une « success story » à la française, l’aventure réussie d’un «made in Normandy» dont les Américains raffolent.
Texte : Jeanne Morcellet - Photos : Patrick Forget
Texte : Jeanne Morcellet - Photos : Patrick Forget
Dans l’entreprise Bohin, on n’est pas peu fier, et à juste titre, d’avoir eu le culot et le talent de faire marcher à plein régime et sans jamais l’arrêter la machine à remonter le temps. Pensez, les aiguilles à coudre des ménages et des professionnels proviennent toutes de la même manufacture, la Manufacture Bohin, la seule, l’unique, et surtout la dernière à produire des aiguilles en Europe et à fabriquer des épingles en France. Entre tradition et efficacité, entre histoire industrielle et valorisation patrimoniale, les usines Bohin, jamais délocalisées, s’ouvrent aujourd’hui aux visiteurs qui plongent avec délice dans les méandres de l’histoire industrielle et de l’art au quotidien.
Dans la bâtisse cerclée de briques rouges, l’histoire des Bohin croise celle de ces industriels du XIXe siècle, soucieux de fabriquer des produits de qualité dans des usines familiales. En 1833, Benjamin Bohin fonde sa Maison. Au bord de la Risle, dans le pays d’Ouche qui s’est imposé depuis le Moyen Age comme berceau de l’épingle et de l’aiguille, la fabrique se porte bien, à l’image de cette Normandie installée dans une métallurgie en pleine croissance. La vie à l’usine épinglière est si bien cadencée qu’elle illustre à la lettre le fondement de la théorie l’économiste Adam Smith sur la division du travail.
Autant dire que le métier d’épinglier semble promis à un bel avenir, ses fondations paraissent si pérennes… Alors on achète des machines, on usine, on fabrique, on trie, on crée, on vend. À la fin des Trente Glorieuses, l’usine résiste aux remous d’une désindustrialisation qui s’amorce, et se défend contre la mondialisation rampante. Bohin tient le coup et ne capitule pas. Pourtant elle a bien failli fermer ses portes en 1997...
N’empêche aujourd’hui, ses plus vieilles machines qui datent des années 1850 et ses plus récentes –de 1930 tout de même, tournent toujours, et toujours bien ! La magie d’un temps a priori révolu et qui n’a pas dit son dernier mot ! Loin de la robotisation et de la frénésie du « toujours plus », les salariés reproduisent avec mesure, dextérité et patience, les mêmes gestes et les mêmes pratiques qu’avant. La Manufacture porte en elle ce fol espoir, celui d’un produit français de qualité qui séduit et s’exporte, la consécration du désormais célèbre « made in France ».
Mieux encore ! Quand sur le marché américain, le plus gros distributeur de produits de couture s’appelle Krieger, et que son père Rob a été l’aide de camp d’Eisenhower, le commandant des forces alliées du D-Day, les affaires entre le patron des aiguilles « made in Normandie » et les Américains se multiplient et les ventes décollent. L’usine de Saint-Sulpice-sur-Risle vend dans 35 pays et profite d’une image qui allie bon goût, sens de la création et de la couture, authenticité et rareté.
Depuis mars, les visiteurs sont invités à déambuler dans la Maison, à regarder de près les opérateurs travailler. Heureux de prendre le pouls d’une production devenue emblématique, au milieu des bruits, des odeurs, et d’une ambiance unique, ils se familiarisent avec les nombreuses étapes de la fabrication d’une aiguille à coudre ou d’une épingle à tête de verre. Le temps de se rappeler qu’une aiguille, ça sert aux travaux de couture, de reliure, de broderie, de crochet, de tricot, de maroquinerie, de reliure, de taxidermie… Le temps de visiter le tout nouveau musée contemporain étalé sur deux étages. De fil en aiguille… Quand l’histoire rejoint le présent.
Dans la bâtisse cerclée de briques rouges, l’histoire des Bohin croise celle de ces industriels du XIXe siècle, soucieux de fabriquer des produits de qualité dans des usines familiales. En 1833, Benjamin Bohin fonde sa Maison. Au bord de la Risle, dans le pays d’Ouche qui s’est imposé depuis le Moyen Age comme berceau de l’épingle et de l’aiguille, la fabrique se porte bien, à l’image de cette Normandie installée dans une métallurgie en pleine croissance. La vie à l’usine épinglière est si bien cadencée qu’elle illustre à la lettre le fondement de la théorie l’économiste Adam Smith sur la division du travail.
Autant dire que le métier d’épinglier semble promis à un bel avenir, ses fondations paraissent si pérennes… Alors on achète des machines, on usine, on fabrique, on trie, on crée, on vend. À la fin des Trente Glorieuses, l’usine résiste aux remous d’une désindustrialisation qui s’amorce, et se défend contre la mondialisation rampante. Bohin tient le coup et ne capitule pas. Pourtant elle a bien failli fermer ses portes en 1997...
N’empêche aujourd’hui, ses plus vieilles machines qui datent des années 1850 et ses plus récentes –de 1930 tout de même, tournent toujours, et toujours bien ! La magie d’un temps a priori révolu et qui n’a pas dit son dernier mot ! Loin de la robotisation et de la frénésie du « toujours plus », les salariés reproduisent avec mesure, dextérité et patience, les mêmes gestes et les mêmes pratiques qu’avant. La Manufacture porte en elle ce fol espoir, celui d’un produit français de qualité qui séduit et s’exporte, la consécration du désormais célèbre « made in France ».
Mieux encore ! Quand sur le marché américain, le plus gros distributeur de produits de couture s’appelle Krieger, et que son père Rob a été l’aide de camp d’Eisenhower, le commandant des forces alliées du D-Day, les affaires entre le patron des aiguilles « made in Normandie » et les Américains se multiplient et les ventes décollent. L’usine de Saint-Sulpice-sur-Risle vend dans 35 pays et profite d’une image qui allie bon goût, sens de la création et de la couture, authenticité et rareté.
Depuis mars, les visiteurs sont invités à déambuler dans la Maison, à regarder de près les opérateurs travailler. Heureux de prendre le pouls d’une production devenue emblématique, au milieu des bruits, des odeurs, et d’une ambiance unique, ils se familiarisent avec les nombreuses étapes de la fabrication d’une aiguille à coudre ou d’une épingle à tête de verre. Le temps de se rappeler qu’une aiguille, ça sert aux travaux de couture, de reliure, de broderie, de crochet, de tricot, de maroquinerie, de reliure, de taxidermie… Le temps de visiter le tout nouveau musée contemporain étalé sur deux étages. De fil en aiguille… Quand l’histoire rejoint le présent.